La mise à jour : pulls en cachemire
La mise à jour est une série en cours sur la valeur intrinsèque de favoriser la qualité des vêtements : acheter meilleur pour en acheter moins. Certaines pièces sont conçues pour durer des décennies, alors que d'autres qu’une saison. Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi il y a une telle disparité dans les prix des pulls en cachemire ou des jeans? Laissez-nous vous expliquer.
Le cachemire est indéniablement le summum du luxe, et ce n’est pas pour rien : il n’y a rien d’aussi réconfortant que d'enfiler son pull en cachemire préféré par temps froid. Fidèle au poste, le cachemire est toujours chaud et doux. Toujours, si et seulement si vous avez investi dans un pull en cachemire de qualité. Sinon, après le premier port, il risque de ne plus être aussi doux, aussi chaud et aussi bien ajusté que lorsqu’il a fait apparition dans votre vie.
Ainsi, le cachemire n'est pas seulement l'archétype du produit de luxe, c’est l'exemple parfait de : « l’on récolte ce que l’on sème. » C'est la preuve qu'à long terme, investir dans le meilleur signifie acheter — et conséquemment, dépenser — moins.
En ce qui concerne les pulls en cachemire, la différence principale est au niveau de leur fabrication et la qualité des matériaux. Ensemble, ils vous offrent un pull qui gardera sa forme plus longtemps, résistera au boulochage et conservera sa texture douce.
Pour comprendre pourquoi un pull en cachemire produit en masse n'est pas à la hauteur de celui fabriqué de manière artisanale, il faut d'abord comprendre ce qui rend le cachemire si spécial et d'où il vient.
D’abord, le cachemire est une forme de laine ; il s'agit d'une fibre animale composée de protéines et de lipides. Il est obtenu à partir de chèvres, et non de moutons comme la laine traditionnelle. Mais pas n’importe quelles chèvres : les chèvres cachemire que l'on trouve principalement dans les régions himalayennes les plus froides de la région du Cachemire, notamment en Mongolie, en Chine et en Afghanistan. Aussi chaud et doux qu’il soit, la récolte de cachemire demande énormément de travail. Une chèvre cachemire peut produire quelques centaines de grammes de laine par an, qui sont minutieusement brossés au lieu d'être rasés ou tondus pendant la récolte. Ensuite, la laine est cardée pour produire la fibre fine tant convoitée. C'est un long processus qui produit peu de fibres utilisables, voulant dire qu'un seul pull peut nécessiter la contribution de plus d'une demi-douzaine de chèvres.
Avec l'augmentation de la demande de cachemire et la prolifération des entreprises axées sur la quantité et non sur la qualité, la solution fut d’augmenter le nombre de chèvres de cachemire dans les plaines de Mongolie, de Chine et d'Afghanistan. Même si elles produisent considérablement moins de fibres que d'autres mammifères, les chèvres cachemire ont besoin de beaucoup d'eau et de nourriture — qui, à son tour, nécessite encore plus d'eau. Sur le plan environnemental, la prolifération du cachemire produit en masse, moins cher et plus abordable, est désastreuse. La véritable explosion de la population de chèvres cachemire a transformé des pans entiers de terre en désert aride, qui a ensuite déclenché des tempêtes de poussière détectables jusqu'en Amérique du Nord.
Ça peut sembler abstrait lorsqu'on envisage un pull, mais l'augmentation de la production de cachemire a également des implications qualitatives. Comme pour la plupart des choses, presser le citron proverbial mène souvent à des raccourcis — ou à un produit distillé. Le surpâturage et la surpopulation entraînent une surcharge de travail pour les éleveurs, les agriculteurs et les récoltants, ainsi que plus de chèvres malades et mal nourries. Tous ces facteurs ont une incidence sur la qualité de la fibre, soit parce que les animaux ne reçoivent pas la nourriture dont ils ont besoin pour un pelage sain, soit en raison d’erreurs humaines dues à un rapport chèvre/homme disproportionné dans les troupeaux. Un cachemire de moindre qualité donne lieu à des pulls plus susceptibles de boulocher, de se déformer ou de perdre leur couleur.
Un bon pull en cachemire — celui qui vous durera des décennies — se distingue par l'accumulation de petits détails tout au long du processus de production. Pensez-y comme des intérêts composés, mais sous la forme d’un savoir-faire artisanal.
Les pulls de Brunello Cucinelli ou de ZEGNA utilisent du cachemire provenant de troupeaux plus petits et mieux gérés, livrant donc des chèvres cachemire en meilleure santé, plus fortes et qui ont un pelage de meilleure qualité que leurs cousines dans des conditions difficiles. En outre, le fait d'avoir moins de chèvres permet aux bergers d’être plus attentifs lorsqu'ils brossent leur pelage et récoltent le cachemire brut, permettant conséquemment de réduire les fibres cassées. Qui dit processus plus lent et plus délicat, dit plus de temps — et qui dit plus de temps, dit plus d'argent — pour produire le cachemire brut.
C'est là que les différences tangibles entre votre pull plus cher et les alternatives moins chères deviennent plus évidentes. Les meilleurs pulls en cachemire utilisent le cachemire brut de qualité supérieure qui produit des fibres plus longues. À leur tour, ces fibres peuvent être utilisées pour produire des fils plus doux et plus durables, car des fibres plus longues entraînent moins de dégradation du textile au fil du temps et, conséquemment, moins de boulochage. En somme, la fibre de meilleure qualité donnera un pull en cachemire qui sera plus beau et plus doux plus longtemps. Le fait d’utiliser que du cachemire de haute qualité et de le tricoter serré, plutôt qu'avec beaucoup de lousse, résultera dans un pull qui gardera sa forme au fil du temps, plutôt que de s'affaisser ou de s'étirer —valant le coût supplémentaire.
Le dernier élément à considérer, et non le moindre, est qu’il faut des artisans qualifiés et des finitions élaborées pour transformer les fils et les textiles de la meilleure qualité en magnifiques pulls. Le cachemire de la plus haute qualité est très délicat, donc il doit être teint et aéré sans utiliser de produits chimiques lourds, qui réduiraient sa douceur caractéristique. Les teintures naturelles et les procédés plus artisanaux utilisés ici coûtent plus cher que leur contrepartie de masse. Le foulage permet de laver les textiles à l'eau pour éliminer les imperfections et rend le vêtement fini plus doux. Les détails de haute qualité — notez les poignets, le col et l'ourlet, ou les coutures le long du torse et aux emmanchures — rendent tout l’honneur dû à ces pulls, une tenue raffinée qui est aussi robuste et prête à résister à l'épreuve du temps.
On ne se le cachera pas : c’est tentant d'acheter un pull en cachemire moins cher, mais il est indéniable que ça entraîne des coûts sociaux, environnementaux et même financiers. La centaine de dollars peut sembler plus abordable aujourd'hui, mais si vous devez acheter un nouveau pull chaque année pendant la prochaine décennie, les calculs sont simples : vaut mieux acheter un article un peu plus cher dès le début, mais meilleur pour l'environnement, mieux fait et conçu pour durer.